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« […] quels que soient les obstacles que l’histoire lui apportera, c’est dans le sens de sa libération que mon peuple (et à travers lui les autres) ira. L’ignorance, les préjugés, l’inculture peuvent un instant entraver ce libre mouvement, mais il est sûr que le jour inévitablement viendra où l’on distinguera la vérité de ses faux semblants. Tout le reste est littérature ».

Et le temps lui a donné raison car le peuple kabyle, et à travers lui les autres peuples frères, marche en effet dans le sens de sa libération.

Hommage à Dda Lmulud:
Intellectuel kabyle, amazigh et universel

Mouloud Mammeri (en kabyle: Lmulud At Mɛammeṛ), né le 28 décembre 1917 dans le village de Taourirt-Mimoun dans la commune actuelle d’Ait Yenni, Département de Tizi Ouzou (Kabylie), et mort le 26 février 1989 à Aïn Defla (Algérie), est un écrivain, anthropologue, linguiste spécialiste de la langue et de la culture berbères (Amazigh).

Son œuvre multidimensionnelle demeure la base de tout ce qui s’effectue aujourd’hui dans le domaine amazigh.

Il était certes kabyle mais sa dimension dépasse la Kabylie et même Tamazgha . C’est un érudit universel. Il a démontré, à travers son œuvre scientifique que nous avons une civilisation digne de respect qui a inspiré d’autres peuples qui y ont trouvé les concepts de laïcité et de démocratie qui étaient les fondements de la structuration sociale.

Dda Lmulud appartient à son peuple qu’il a toujours défendu dans la dignité.
“Le nombre de jours qu’il me reste à vivre, Dieu seul le sait. Mais quelque soit le point de la course où le terme m’atteindra, je partirai avec la certitude chevillée que quelque soient les obstacles que l’histoire lui apportera, c’est dans le sens de sa libération que mon peuple – et avec lui les autres – ira. L’ignorance, les préjugés, l’inculture peuvent un instant entraver ce libre mouvement, mais il est sûr que le jour inévitablement viendra où l’on distinguera la vérité de ses faux semblants. Tout le reste est littérature”.

Durant la guerre de libération algérienne, tous les courriers du FLN, adressés et introduits à l’ONU, ont été pensés et rédigés par Mouloud Mammeri pendant que ceux qui gouvernent l’Algérie depuis 1962 le traitaient de Harki, alors que pendant la guerre, ils étaient encore dans les rangs de l’Armée coloniale française ou dans l’armée des frontières, qui n’a jamais tiré une seule cartouche contre l’armée française mais qui est rentrée en 1962 pour liquider les maquisard de Kabylie, usurper l’indépendance afin de substituer l’Algérie arabo-islamique à l’Algérie française .

Il fut l’écrivain Amazigh le plus engagé dans la défense de la première langue de l’Afrique du Nord, ce qui lui valut toutes sortes de persécutions.En 1980, c’est l’interdiction d’une de ses conférences à l’université de Tizi Ouzou sur la poésie kabyle ancienne qui est à l’origine des événements historiques du Printemps berbère. De ce point de vue, on peut dire que Dda Lmulud a été le pionnier d’une révolution culturelle qui ne fait que commencer, et qui lui doit ses premiers pas.

Dda Lmulud est officiellement décédé, le 26 février 1989 sur la route de Aïn-Defla dans un accident de la route mettant en cause un arbre venu s’abattre sur son véhicule…Le rassembleur qu’il était n’a pas été victime d’un accident de circulation comme le laisse entendre l’Algérie officielle. Il a tout simplement été assassiné par le pouvoir algérien.

Dda Lmulud (Mouloud Mammeri, ndlr) nous a montré la voie à suivre en déclarant: « une langue a besoin d’un Etat ». Soyons les dignes continuateurs de son œuvre.

La culture et la politique sont indissociables. C’est la langue et la culture de ceux qui gouvernent qui dominent les structures de l’Etat. Alors nous n’avons pas d’autres choix que de prendre notre destin en main si nous ne voulons pas disparaitre .